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Un épicurien qui mord à pleines dents dans la vie

Saturday, May 28, 2011

Sur la route de l'Orient 5 (Samarcande)

La soirée est douce, une petite bise bienfaisante s'est levée après une journée écrasée de chaleur. De tous les coins de la ville se sont élevés des chants des lycéens, étudiants... enfin libérés de leurs obligations scolaires et contents de célébrer leur début de vacances annuelles.

La cité semble être livrée aujourd'hui à la jeunesse. Depuis tôt ce matin, on voit partout en ville des jeunes gens dans leurs plus beaux atours, et certains portent autour de leur taille des écharpes, un peu à la manière des miss, signe d'une année scolaire réussie et méritante. Le soir venu, des réunions spontanées ont lieu dans les différents parcs de l'endroit, et c'est parti pour un happening bon enfant, loin des excès des soirée de fin d'année d'étude de nos étudiants occidentaux.

Des mélopées arabisantes et envoûtantes qui rendent la nuit de Samarcande encore plus belle et mystérieuse, surtout du côté du Registan, cette place de légende où a été construit (et restauré dans sa splendeur originelle) le complexe le plus grandiose de toute l'Asie centrale et l'un des plus beau de l'islam.
Nous sommes arrivés ici il y a deux jours et à la descente du bus qui nous mène au Registan où nous avons notre Guesthouse tout proche, les bras nous en tombaient et nous étions complètement saisis par l'émotion en voyant cet ensemble architectural d'une majestueuse beauté. Et ce n'est qu'une petite partie de ce qu'offre cette merveilleuse cité. Les superlatifs n'ont jamais manqué pour décrire la beauté de Samarcande: Miroir du monde, jardin de l'âme, joyau de l'islam, perle de l'Orient, centre de l'univers etc ...

Cette ville dont les origines remontent au VIe siècle avant notre ère, peut-être même plus loin, a été le carrefour des diverses branches de la Route de la Soie, celle de l'Ouest vers la Perse, celle de l'Est vers la Chine et celle du Sud vers l'Inde. Alexandre le Grand, Gengis Khan ont été ses conquérants, jusqu'à ce que Tamerlan, ce berger turco-mongol parti de rien avant de devenir un bâtisseur d'empire sanguinaire dont les troupes ont déferlé de l'Inde à la Russie, l'ait choisie pour capitale de la Transoxiane vers 1370.

Rien n'est assez beau pour sa ville. De ses conquêtes de Perse, d'Asie mineure, d'Inde, il ramène des artisans, architectes, maçons, peintres, calligraphes, céramistes, tisserands etc... ainsi que les plus grands esprits de ces pays: théologiens, savants, historiens et autres pour faire de sa capitale, le phare du monde comme il disait.
Des portes principales, six rues menant par des places entourées de fontaines, de mosquées, de médersas et de caravansérails, jusqu'à la galerie commerçante couverte d'un dôme au centre de la ville: le fameux Registan dont je vous ai parlé plus haut.
Vers le début du XVe siècle, son petit fils Ouloug Beg y ajoutait d'autres édifices, et un certain gouverneur du nom de Yalantouch Bakhadour en a encore construit d'autres plus tard. Et c'est ce qui donne sa configuration actuelle.

A part cette fameuse place, Samarcande contient d'autres monuments tout aussi majestueuse et chargés d'histoire tels que la mosquée Bibi Khanoum du nom de la femme chinoise de Tamerlan, ou l'obervatoire d'Ouloug Beg, voire le nécropole de Chah-i-Zinda et bien d'autres encore dont l'énumération sera par trop fastidieuse.
Ici aussi, comme à Khiva et Boukhara, il ne subsiste de l'état original des édifices que 5 ou 10 %, le reste a été restauré de façon remarquable dont les travaux ont déjà commencé depuis l'époque soviétique. Bref, on est là dans une sorte de ville des Mille et une Nuits, de l'histoire à tous les coins de rue comme Rome ou Babylone.

Par contre, il n'y avait aucune organisation cohérente de la part des autorités ouzbekes pour l'exploitation de ces trésors. A certains endroits, aucun droit d'entrée à payer, à d'autres, le visiteur étranger doit payer 30, 40 fois plus qu'un citoyen ouzbek (ce qui provoque la grogne de pas mal de voyageurs car ils ont l'impression d'être victimes de discrimination - voire considérés comme des banques sur deux pattes juste bons à payer). Il y a aussi des endroits où vous payez si vous passez par l'entrée principale, mais pas si vous passez par derrière ou latéralement. Et encore d'autres où vous devez payer aux gens qui n'ont rien d'officiels, à croire qu'ils ont trouvé le bon filon pour rouler les autorités et les touristes dans la farine. Très étrange tout ça ! Il règne une sorte d'anarchie à tous les niveaux.

Nous sommes descendus, avec mes compagnons de voyage rencontrés sur la route, Gilli et Tali, à Bahodir B&B, encore une adresse qui nous a été refilée par le bon vieux Horst. Un emplacement imbattable et des prix doux, à deux minutes du Registan et en plein coeur du vieux Samarcande. Certains soirs, notre guesthouse a tout de l'auberge espagnole à l'instar de ce que fut cette ville à l'époque: un lieu de rencontre des voyageurs où le Chinois discutant commerce avec un Perse, le Sogdien parlant de religion avec un Zoroastrien. Là nous avons des Polonais qui parlent politique avec des Israéliens, des Malaysiens qui parlent cuisine avec des Bulgares, les Anglais qui échangent des tuyaux de voyage avec les Russes, et des Japonaises qui se contentent d'écouter et de sourire en cachant leur bouche dans les mains. On entend parler toutes les langues et les conversations et les rires résonnent jusque tard dans la nuit. Vraiment très sympathique comme endroit.

Hier, avec Gilli et Tali, nous sommes allés faire un tour à Chakrisabz, la ville natale de Tamerlan qui se trouve à une huitantaine de km de Samarcande, par une belle route de montagne qui grimpe à 1675 mètres d'altitude franchissant un col qui offre un superbe panorama sur la vallée et sur cette ville où on peut voire encore les restes du plus grand projet du tyran: son Palais blanc qui a partiellement disparu, auquel il ne subsistent que deux tours grandioses qui témoignent néanmoins de son âge d'or. Et aussi d'autres ensembles de mosquées et de mausolées.

A la fin de cette intéressante journée, Tali et Gilli m'ont quitté pour partir sur Tachkent avant de poursuivre leur voyage vers le Kirghistan voisin le lendemain. Et alors que cet après-midi pendant que j'écris mes cartes postales dans le patio de l'auberge, voilà qu'une bonne surprise survient avec l'arrivée de Xu, le sympathique Taiwanais rencontré la semaine passée à la capitale ouzbeke. Il arrive souvent ici qu'on croise des gens connus le long de cette fameuse route car tous sont venus en Ouzbékistan pour ces célèbres villes de légende. On a repris nos conversations avec Xu, laissées en suspense à Tachkent et j'ai appris qu'il n'a pas pu obtenir son visa pour le Kirghistan et du coup, il va passer en Chine le 1 juin et il y aura bien des chances qu'on va se croiser de nouveau là-bas car il m'a déjà demandé l'adresse pour le guesthouse dans lequel j'ai mes habitudes à Pékin, ça va être cool !

Je vais rester encore une journée pour profiter encore un peu de cette belle ville et de me relaxer un peu avant de revenir sur Tachkent la veille de mon retour vers la Chine. Ce sera une journée tranquille avec une petite grasse matinée qui me changera de ces dianes matinales et aussi pour reposer un peu mon estomac qui a souffert ce matin du repas pris la veille au bazaar à Chakrisabz. Je m'y attendais d'ailleurs, à force de vouloir expérimenter une cuisine authentique en allant manger dans des endroits populaires. La soupe ouzbeke était certainement faite avec des produits peu frais, du coup en me levant ce matin, j'avais le ventre tout balonné et j'ai du jouer à quelques reprises à Tamerlan trônant dans son palais comme ses nombreuses statues en ville de Samarcande :) une pilule d'Immodium plus quelques gorgées de Coca et l'affaire était réglée.

Voilà la transition toute trouvée pour vous parler de la cuisine ouzbeke qui n'est pas ce qu'on appelle de la cuisine fine. Beaucoup de chacklicks, ces brochettes de viande de mouton, boeuf, ou poulet. Les ouzbeks les aiment bien avec les morceaux de gras. Les choux, les poivrons farcis, les lagmans, une sorte de nouille en soupe ou sautée, et le plov, un genre de riz pilaf avec de la viande bien cuite et du raisin sec avec beaucoup d'ail (le plat national ici), les choux-fleurs frits etc... Le tout baignant dans beaucoup d'huile. Et aussi de temps en temps une borsch ou des pelmenis, héritage du grand frère russe ! Pas très variée comme cuisine je dois dire, et cette utilisation généreuse de l'huile de coton qui ne convient pas beaucoup aux estomacs occidentaux peu habitués à cette denrée. Dans les restos et les pseudos cafés (on a pas ici la même conception du café - endroit de rencontre comme en Occident), on a tendance à facturer d'après la tête du client. En tant qu'étranger, attendez vous à ce que les factures soient quadruplées voire même plus. Et d'un jour à l'autre, les prix changent on ne sait pas pourquoi. Certainement une maladie infantile qui touchent tous les pays fermés pendant longtemps et qui s'ouvrent aux visiteurs étrangers.

Et bien mes chers, après ces quelques considérations socio-culinaire-touristicos, je crois qu'il est temps pour moi d'aller faire dodo car la nuit est bien avancée ici à Samarcande. Donc comme j'ai dit plus haut, le 29 je vais descendre sur Tachkent et le 30 j'ai l'avion pour Pékin. Alors vous aurez des news d'ici là d'acc. ? A tantôt, vous embrasse bien fort.

JPB

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